dimanche 26 avril 2009

Jean-Luc Godard parle des "auteurs"


« La perversion de la notion d'auteur est incontestablement un héritage négatif de la Nouvelle Vague. Avant, ceux qui étaient considérés comme auteurs des films étaient les scénaristes, une tradition qui venait de la littérature. Au générique, les noms des metteurs en scène venaient en dernier, sauf pour des gens comme Ford ou Capra, mais uniquement parce qu'ils étaient également producteurs. Mais nous, nous avons dit : "Non, la mise en scène est l'acte fondateur et véritablement créateur du film. Et Hitchcock est auteur au même titre que Balzac.

A partir de là, on a développé la politique des auteurs, qui consistait à soutenir l'auteur, même lorsqu'il était faible. On soutenait plus facilement un mauvais film d'un auteur, qu'un bon film de quelqu'un qui ne l'était pas. Et puis après, le concept s'est perverti, il s'est transformé en un culte de l'auteur, et non de son travail. Alors, tout le monde est devenu auteur, et aujourd'hui c'est tout juste si le décorateur ne demande pas à être reconnu en tant qu'auteur des clous qu'il plante dans le décor. Le terme ne veut donc plus rien dire.

Très peu de films sont faits par leurs auteurs, aujourd'hui. Trop de gens s'occupent de choses dont ils ne sont pas capables. On reconnaît des talents, des originalités, mais le système n'existe plus, c'est devenu quelque chose de vaste et de marécageux. Je pense que lorsque nous avons lancé la politique des auteurs, nous nous sommes trompés en privilégiant le mot "auteur" alors qu'en fait, c'est le mot "politique" qu'il fallait mettre en valeur. Car le véritable but de ce concept n'était pas de démontrer qui fait la mise en scène, mais plutôt ce qui fait la mise en scène. »

Source : Leçons de Cinéma / Mad Movies

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